»  DEUIL,PERTES et SEPARATION :  Accompagner le processus « 

 – Comprendre le processus de deuil pour proposer une relation de     confiance et d’écoute à la personne en situation de deuil ou de perte          ( perte de santé , perte d’autonomie…)

Depuis notre conception,  notre vie est une suite d’attachements et de séparations …

Nous avons été amenés à vivre un certains nombres de pertes avec lesquelles nous nous sommes construits et dans lesquelles nous avons puisé nos faiblesses et nos forces, nos fragilités et nos ressources …

Car, »l’intégration des premiers deuils est un principe de base de l’aptitude à reconnaître la perte chez l’adulte « (1)

Le deuil est un processus psychique qui se met en place chaque fois que nous subissons une perte qui nous affecte .

 C’est un processus naturel d’adaptation qui tend vers la guérison psychique .

LES ETAPES DU DEUIL

Elisabeth Kûbler-Ross (2)  médecin psychiatre ,ayant accompagné de nombreuses personnes en fin de vie et des familles en deuil,  a pu observer que les personnes passaient progressivement par des étapes  leur permettant d’intégrer le deuil ou la perte,  qu’il s’agisse de la perte de sa vie ou de la perte d’un être cher .

« Nous avons demandé aux malades d’être nos maîtres en nous apprenant à mieux connaître les étapes finales de la vie,les anxiétés, les craintes, les espoirs par lesquels on passe en abordant cette dernière phase de l’existence  » (2) 

Ces étapes peuvent donc nous servir de repère en sachant que le processus n’est pas linéaire, et que, à chaque fois, ce travail de deuil est unique et participe à une histoire individuelle et collective .

Ces étapes sont comme des voiles qui se soulèvent à la conscience et permettent d’entrevoir progressivement la réalité de la perte . 

Nous passons donc par le déni, la colère, le marchandage, la dépression pour arriver vers l’acceptation.

  1. M-F BAQUE « Parlons de la mort et du deuil »
  2. E.KUBLER-ROSS  » Les derniers instants de la vie « 
  3. DR Christophe FAURE  » Vivre le deuil au jour le jour  » – Albin Michel
  4. Dr Michel HANUS -M-F BAQUE « Le deuil  » Que sais-je 

1 – LE DENI

Lorsqu’on vient de perdre quelqu’un ou d’apprendre un diagnostic grave,

La première réaction est le DENI, la NEGATION, le  » NON ! Ce n’est pas possible ! « .

Il y a une sorte de SIDERATION, d’ETAT de CHOC , » on est comme anesthésié…anéanti . »On ne réalise pas « … »On a besoin de voir pour y croire »…

« De fait, la conscience reste incrédule, quand bien même la réalité, nue et sans concession, s’impose avec violence … » (3)

Le plus souvent, il y a une sorte d’anesthésie émotionnelle .

Ce refus est une protection psychique contre la violence de la réalité . Pour  Christophe Fauré, psychiatre spécialiste du deuil, « cette mise à distance de toute émotion doit être pourtant perçue comme un allié qui permet d’entrer, à son propre rythme, dans le processus de deuil . »(3 )

Le déni pourra durer de quelques jours à quelques semaines … Mais il arrive aussi que des personnes restent dans le déni très longtemps rendant ainsi la suite du deuil en suspend …

On peut aussi, au cours du deuil avoir besoin de revenir dans le déni comme dans un refuge .

2 – LA COLERE ET L’IRRITATION

La réalité de la perte atteignant progressivement la conscience; la personne entre dans une phase de COLERE et d’IRRITATION :

 » Pourquoi ?  Pourquoi moi ? Pourquoi lui ? … »

C’est une réaction instinctive à la perte annoncée, une tentative de changement de la réalité comparable à celle du petit enfant en colère .

Face à cette réalité ,nait un sentiment de révolte et d’injustice  contre soi, contre l’autre, contre celui qui est parti ( même si c’est souvent refoulé à ce stade ), contre les soignants …contre Dieu… 

 » Si Dieu existe, pourquoi a-t’il fait mourir … ? « 

 Les valeurs philosophiques, religieuses et spirituelles sont brutalement questionnées et le seront tout au long du deuil .

« la colère émerge souvent comme un moyen de se protéger contre quelque chose de plus douloureux …elle trouve parfois sa véritable source ailleurs et cette prise de conscience peut apporter un éclairage différent sur ce qu’on est en train de vivre aujourd’hui dans son deuil  » (3)

La colère est souvent dirigée alternativement contre les autres et contre soi ,bruyante ou silencieuse, faisant naître le sentiment de culpabilité qui va être très présent dans le processus de deuil .

 NB / La culpabilité :

Dans la situation du deuil, c’est aussi une période de culpabilité très intense pendant laquelle la personne essaie de rattraper quelque chose .

La CULPABILITE cherche une faute, un coupable … »elle impose la punition, la réparation de la faute commise …et le cœur se retrouve sur les charbons ardents à ne pas pouvoir s’acquitter de sa dette . » (3) 

La culpabilité, dans son jugement sans pitié s’accompagne  d’une  » baisse de l’estime de soi  » et d’une « idéalisation du défunt »(3)

La culpabilité est parfois d’autant plus présente qu’il y avait dans la relation avec la personne décédée ou dans la famille des non-dits, des secrets ou des conflits …

Souvent, au cours du deuil, la colère et la culpabilité s’estompent ;

Mais il peut y avoir « cette culpabilité qui persiste et dont on ne parvient pas à se dégager . Elle finit par occuper toutes les pensées et peut stopper dans son élan la dynamique du travail de deuil  … »(3)

3 – LE MARCHANDAGE

Selon E. Kûbler-Ross, la troisième étape, l’étape du marchandage est bien moins connue mais tout aussi utile pour le malade, bien que ce soit seulement pour de courtes périodes …Le marchandage est en réalité une tentative de retarder les événements ; beaucoup de marchandages font intervenir Dieu et sont tenus secrets .(2)

La personne en deuil  approche progressivement la réalité de la perte  et le marchandage est une tentative inconsciente de changer la réalité grâce à la pensée magique .

« Oui,mais … » Si j’avais fait ceci… »

Négociations,chantages, recherche de solutions, on imagine alors que si nous faisons de telle manière ou si nous avions fait de telle manière la réalité serait différente .

Par exemple la personne qui a une maladie grave ou qui est en fin de vie va vouloir essayer un nouveau traitement, rencontrer un autre médecin, investir des projets peu réalistes …cette phase a d’intéressant qu’elle remobilise l’énergie .

4 –  LA TRISTESSE ET LA DEPRESSION

Le voile se soulève et c’est une phase très importante de rencontre avec la réalité que la personne regarde avec chagrin, tristesse, dépit …

La douleur est très grande et l’intensité du manque se fait vivement ressentir .

 » Il n’y a plus rien à l’extérieur et à l’intérieur tout reste à reconstruire » – 3 –

Les symptômes associés à cette période sont des troubles du sommeil et de l’appétit, des douleurs physiques diverses,,une baisse de l’intérêt et le retrait social, une baisse de l’estime de soi de la tristesse et quelquefois des idées suicidaires …

La fatigue peut-être intense car le travail de deuil est en cours dans la profondeur : C’est la phase d’intériorisation au cours de laquelle on va pouvoir remplacer l’absence par une présence intérieure .En ce sens, cette phase apparaît comme le chaudron  magique de la transformation .

La personne remémore ses souvenirs et les confronte avec la réalité .

 » Le temps du deuil est une véritable relecture de tout ce qu’on a vécu avec le défunt, parfois même dans les plus infimes détails . » (3)

5 – L’ACCEPTATION

 » Il ne faut pas croire que l’acceptation puisse être confondue avec une étape heureuse . Elle est presque vide de sentiments, c’est comme si la douleur avait fuit, la lutte est derrière nous et un nouveau temps commence … » – 2 –

Le malade à la fin de sa vie trouve une certaine paix, une acceptation, un lâcher-prise .

C’est une période « méditative », une sorte de repos du guerrier empreint de détachement.

La personne peut regarder sa vie et ses souvenirs avec sérénité . 

Pour la personne en deuil ,au fil du temps, malgré les aller-retours et malgré la confrontation à la douleur,le long processus d’intériorisation va lui permettre de garder en elle, le souvenir de la personne perdue ; En même temps, elle va commencer à réinvestir la vie et à s’impliquer dans de nouveaux liens .

C.FAURE parle de restructuration :

« Voilà déjà des mois qu’on se débat dans ce deuil, on est fatigué, épuisé, alors même que s’amorce l’incontournable nécessité de reconstruire sa vie . »– 3 –

La personne redéfinit alors sa relation à autrui et au monde, sa relation à la personne disparue et sa relation à elle-même, en intégrant le deuil dans sa vie .

 » le travail de deuil, mené avec soin se porte garant du non-oubli « . (3)

Le deuil se termine, la plupart du temps, de manière naturelle par une phase de rétablissement .

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LE DEUIL ANTICIPE ou LE PRE-DEUIL :

Certaines personnes anticipent et se préparent au deuil du fait de situations particulières : Maladie, coma, mort annoncée ou prévue plusieurs fois …

« C’est comme si la personne n’était déjà plus là … »

Cela peut donc créer une sorte de décalage avec la réalité …

LE DEUIL BLANC :

Dans le cas de maladie ou d’accidents qui provoquent de grands changements dans la personnalité ( maladie d’ Alzheimer, traumatisme crânien grave … ) l’entourage est amené à faire le deuil de ce que la personne était avant, du rôle qu’elle avait , de sa reconnaissance  …

LE DEUIL PERINATAL :

La mort périnatale peut survenir en cours de grossesse, à la naissance, ou durant les sept premiers jours de vie, selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé. Le deuil périnatal n’est pas un deuil du passé, mais un deuil de l’avenir, de la vie qui n’aura pas lieu, un deuil des projets. 

LES DEUILS PATHOLOGIQUES

Ce sont des deuils qui sont compliqués du fait d’une situation particulière ( Décès violents, disparitions …) ou du fait d’une fragilité antérieure au décès ( Dépression, pratiques addictives …) ou bien en l’absence de soutien social et affectif .

Il peut y avoir :

– Absence de deuil ou absence d’expression de deuil ( déni perpétuel ) 

– Exagération ou cristallisation à une étape ( irritation , dépression …)

Conversion du deuil en somatisations ( maladies physiques ou psychiques …)

– un deuil chronique avec un chagrin sans fin qui s’intensifie avec le temps … 

– un deuil impossible ( comme dans le cas des personnes disparues ) … 

Ces deuils nécessiteront alors un soutien psychothérapeutique et/ou médical .

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L’AIDE AU PERSONNES EN DEUIL

Le deuil est une manifestation physique et psychologique, un événement social et relationnel en réponse à la perte d’un être cher ou de quelque chose d’important pour soi, qui peut provoquer de grands remaniements psychiques et spirituels .

Le deuil est toujours une histoire personnelle inclut dans une histoire collective et un contexte .

Tout deuil peut venir réactiver, réveiller des situations de pertes antérieures (deuils anciens, séparations difficiles, sentiment d’abandon …) y compris issues de l’enfance et la toute petite enfance .

Les personnes en deuil ont donc besoin d’une écoute attentive, dans le non-jugement . Cela aide la personne à traverser et à aller jusqu’au bout du processus; en évoquant et en vivant les émotions liées au deuil, en ayant un espace pour parler du souvenir autant qu’il sera nécessaire … En ce sens, elles auront besoin d’un entourage psycho-social  et solidaire  suffisamment bon pour les accompagner sur ce chemin … 

Dans le temps, le processus de deuil peut-être reconnu, par la personne qui le vit, comme un processus de cicatrisation, voir de guérison ou d’évolution .

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